Le cauchemar climatisé (Las Vegas 7/8)

Ok, encore un emprunt littéraire (Henry Miller, « The Air-Conditionned Nightmare », 1945). Mais aucun titre ne pourrait mieux décrire l’expérience de Las Vegas. Même dûment équipés des lunettes théoriques proposées par Robert Venturi, Denise Scott Brown et Steven Izenour dans « Learning from Las Vegas » (1972, voir un petit résumé ici), on se retrouve vite assommé par la vulgarité, la saleté et la laideur de cette ville. Les casinos sont des endroits glacés par l’abus de climatisation, où décors clinquants et odeurs synthétiquétiques (je garde ce joli néologisme de correcteur automatique) enveloppent des zombies affalés devant leur machine à sous. Et ce n’est pas une figure de style, vraiment. Le nombre de corps mous aux yeux vitreux, enfants gras, couples criards, femmes ficelées dans des mini-robes trop serrées, vieillards surmontés de visières en plastique claudiquant sur leur trépied, qui flottent comme des méduses dans un océan de bruits assourdissants, est plus terrifiant qu’un film de vampires de Robert Rodriguez ou une exposition de Duane Hanson.

Dehors, on est happé par une intense chaleur. Les rues de la ville puent comme une immense station essence. Des clochards décharnés errent entre les touristes. Bon, oui, je fais dans le sensationnalisme, mais les loupiottes et la reproduction quasi intégrale de la Piazza San Marco ne font illusion qu’un moment.

Un regret: avoir manqué le Néon Museum, un cimetière de néons en bordure de la ville. Par contre, la visite de l’Atomic Testing Museum sauve notre expérience de Sin City (cf post suivant). Désarmés, un peu dégoûtés, on n’aura pris que très peu de photos.